mardi 11 octobre 2011

Paulette s'occupe

Liberté. Libertad. Liri. Freedom. Wolnosc.


Aujourd'hui, je suis libre. Je vais pouvoir faire la grasse matinée. Je peux. Je suis au chômage. J'ai le droit. 
Je me lève à 08:30. J'ai un enfant. Je suis mère. On est mercredi. Il n'y a pas école. Je me vengerais bientôt. Je l'inscrirais au tennis. Il sera obligé de se lever encore plus tôt le mercredi. Et toc.
Je mets mon enfant chez sa nounou. Parce que je ne croule pas sous les cotisations patronales moi. Du moins, pas autant que les gros patrons. Je peux bien profiter de la liberté en m'offrant un jour de garde d'enfant.

Aujourd'hui, je vais trier les papiers. Tous. Même la pile de 2008 qui attend. Car le revers de la médaille est là. Je n'ai plus aucun prétexte pour éviter cette corvée. J'ai du temps libre à foison. Je trie donc les papiers et je trouve que c'est quand même bien d'avoir du temps à soi, devant soi. Quand on est chômeuse, on dispose du double de temps par rapport à avant. C'est beau. On a plein de projets, d'idées de choses à faire. On est juste fauché. 

Je range ma penderie aussi. Je retrouve des choses dont j'avais oublié l'existence. Choses inutiles car je ne rentre plus dedans. Mais c'est pas grave . J'ai tellement de liberté et de temps pour moi maintenant, ne plus rentrer dans des robes de soirée est complètement dérisoire à côté de ça.

Comme il est midi, je vais aller chercher le courrier. Je n'y vais plus qu'à midi maintenant, avant, c'est impossible. Sur France2, il y a Motus à 11:00 et Les Z'Amours à 11:30. Après ça, j'ai l'équivalent de 5 minutes de publicité pour aller vérifier la boite aux lettres. Car ça recommence après avec Tout le monde veut prendre sa place. Je regarde ces émissions. J'ai le droit et l'excuse : je suis au chômage. Et inapte aussi. J'ai le droit de m'abêtir devant des émissions jusqu'alors ignorées.


Mon coeur bat toujours très fort lorsque j'insère la clé dans la serrure de ma boite aux lettres. Une émotion contenue, agréable, des dizaines d'idées qui fourmillent dans ma tête. Un notaire qui m'écrit pour m'annoncer que Tante Pétronille est décédée à 108 ans et me lègue toute sa fortune. Je n'ai pas de tante Pétronille, c'est impossible. Une lettre cachetée à la cire, écrite de la main d'un inconnu, fou de moi qui veut m'enlever, là, maintenant, pour faire de moi sa riche épouse en Polynésie. Mon mari ne serait pas très heureux et mon fils serait de mauvaise humeur. Le secret enfin révélé d'un laboratoire qui me propose, à moi, de tester son nouveau sirop amincissant et qui promet une perte fulgurante de 25 kilos en 2 semaines. Inutile. J'ai besoin d'en perdre 40.

Mais rien de tout ça. Non. Un courrier spécialement adressé à moi personnellement de chez Vitrine Magique, me sommant de venir immédiatement retirer l'écran LCD qui a été mis de côté depuis des mois dans l'attente que je me déplace. Je ne pouvais pas y aller plus tôt, j'étais soit au travail, soit en maladie. Maintenant, je peux, je suis au chômage. J'ai le temps. Mais j'ai déjà une télé avec un gros tube cathodique. Ce serait dommage de la jeter. Puis on me l'a donné. C'est donc un cadeau.
Un facture EDF. Le calendrier des jours de sortie des poubelles. Distribué toutes les 3 semaines car il y a toujours quelqu'un qui se trompe et inverse ses recyclables avec ses ordures ménagères. 

Mon coeur cesse de battre, mes idées me paraissent idiotes. C'est comme ça chaque matin. Enfin, chaque midi. Sauf que là. Je la vois soudain. Elle s'était cachée. Une grosse enveloppe marron - mais ils ont tous des actions chez les fabricants d'enveloppe marrons ? - avec écrit dessus, du moins imprimé



***** Musique poignante - Roulements de tambours - notes graves de piano à queue *****



Ceci est un courrier de la part de PÔLE EMPLOI

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